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L’impression qui reste après la première vision d’une image ou d’une série d’images dépend de la rémanence de cette vision — capacité sensorielle de chacun à conserver la trace aperceptive de cette rencontre. Mais la persistance prolongée de la vision tient aussi à la prise de conscience d’un désir de réordonner, re-séquencer et déplacer les accents, à la suite des associations et des références suscitées en nous par la contemplation des images et des objets-images, et par nos réactions. Dans ces conditions, toute vision peut aussi être conçue comme une ré-vision, par le biais de l’identification et de l’examen de ce qui vient « après les images ». Notre exposition collective de l’art américain récent présente des œuvres tirées des meilleures collections privées de Belgique et se concentre sur la façon dont les artistes réagissent à la pléthore d’images et d’informations dans la culture actuelle de « l’écran », qui a pour effet de déstabiliser nos attentes relatives à l’importance de l’image. Organisée au Musée Juif de Belgique, l’exposition After Images remet en question la place de la représentation imagée dans la culture contemporaine, tout en explorant les potentialités affectives de la persistance de la vision à travers tous les supports artistiques : peinture, sculpture, photographie, film et vidéo — et les espaces ou hiatus qui les séparent. Quoique commercialement et politiquement viable, l’imagerie iconique est à la fois convoquée et révoquée dans plusieurs œuvres incluses dans l’exposition : des matériaux tout faits et des images trouvées sont utilisés d’une façon qui contourne l’héritage caricatural de l’Appropriation Art caractéristique d’une bonne partie de la création américaine des années 80. Contexte, source et échange sont naturellement impliqués, mais réduits à l’état de fantômes d’arrière-plan, dans la mesure où la nature associative de la séquence iconographique passe de plus en plus au premier plan. De façon similaire, les éléments tirés des archives et de l’histoire se manifestent, mais pour être rapidement retravaillés et ré-animés, à seule fin d’être à nouveau disloqués et déplacés. La perte et la dispersion des références jadis immuables sont perceptibles dans toute l’exposition. Elles permettent à l’incidence, à la variation et à la ressemblance d’ouvrir des approches associatives et performatives dans lesquelles les images deviennent des séquences soumises à des révisions constantes comme à des revendications assertoriques. De plus, la disparition annoncée et l’anachronisme flagrant de l’imagerie analogique sont fréquemment évoqués et matériellement transposés, afin d’étendre et de renforcer leurs possibilités critiques, tout comme la dualité ontologique qui marque l’histoire de la photographie — opposant la mise en scène du studio à l’enregistrement d’archives ou au documentaire — a fini par disparaître dans une contingence temporelle qui baigne la pratique contemporaine de la sculpture. Et la place de la peinture est, elle aussi, en train de changer. Les procédures abstraites de rédaction, d’effacement et d’annulation rivalisent désormais avec un potentiel transitif renouvelé dont la peinture dispose pour s’impliquer dans des réseaux sociaux spécifiques mais modifiables, réagissant à la surabondance des transpositions fragmentaires et des contenus réifiés qui encombrent l’iconographie populaire. Édifiant continuellement une chose via une technique donnée à seule fin de la transposer dans une autre, les pratiques artistiques actuelles exploitent de plus en plus les intervalles et les hiatus entre les supports, comme autant de moyens de déstabiliser les façons conventionnelles de regarder un objet ou une image. C’est dans le cadre de ce registre d’engagement temporel — quelque part entre la spécificité du support et la représentativité de l’imagerie — qu’apparaît un rythme de reconnaissance qui est anticipatoire et associatif plutôt que fini et représentatif. After Images explore cette persistance de la vision dans l’art américain récent, en donnant à connaître une nouvelle façon de voir, de produire et de rencontrer des images.